🛠️ Nouveau chapitre : devenir Fabmanager à Bondy
- Abcp Corp

 - il y a 1 jour
 - 9 min de lecture
 
Aujourd’hui, j’entre dans une nouvelle étape de mon parcours : je suis désormais Fabmanager.
Mais qu’est-ce qu’un fabmanager, au juste ?
C’est la personne qui fait vivre un fablab, un atelier de fabrication numérique ouvert à tous.
Mon rôle, c’est d’accompagner, de former, d’expérimenter et surtout de donner envie de créer.
C’est un métier à la croisée de la pédagogie, de la technique et de l’humain : on y parle aussi bien impression 3D, électronique, robotique que création, artisanat et imagination.
Et pour moi, c’est une mission qui résonne profondément avec tout ce que j’aime et tout ce que je fais depuis des années.

🎮 La passion de LUMA au service du fablab
Ma passion pour l’électronique, la robotique et ma console artisanale LUMA s’accorde parfaitement avec ce travail.
Depuis que j’ai commencé ce poste, deux jeunes du fablab ont déjà assemblé leur propre console LUMA. Alors oui, pour l’instant, c’est encore très DIY, avec beaucoup de câbles à brancher, des fils qui se croisent un peu partout et des heures de test — mais c’est ça la magie du fait main.
Je sais qu’à terme, il faudra que je conçoive un véritable PCB propre, plus simple et plus solide, pour éviter d’avoir “douze milliards de fils” à connecter.
Mais pour l’instant, cette étape de bricolage et de compréhension fait partie du plaisir : c’est là que naissent la curiosité et la passion.

👾 Un groupe de jeunes créateurs motivés
Ce qui me touche le plus, c’est de voir les enfants s’approprier le projet.
Ils ont formé un petit groupe de développeurs autour de LUMA, et travaillent en ce moment sur leur premier jeu collectif : “Snow Mission”.Ils apprennent à utiliser Aseprite pour créer leurs sprites, ils découvrent le level design, le Game balance, la direction artistique, et même la manière de se mettre d’accord sur une arme et ses effets.Ils discutent, testent, effacent, recommencent…
Ils apprennent sans s’en rendre compte — et c’est là que la magie opère.
De mon côté, je continue à créer de nouveaux concepts de jeux originaux pour eux et pour la communauté.
Quatre autres consoles sont actuellement en cours de préparation pour que de nouveaux jeunes puissent rejoindre l’aventure.

🧠 La pédagogie par la création
Mon rôle de fabmanager ne se limite pas à l’électronique ou au jeu vidéo.
je gère cinq imprimantes 3D, dont une multicolore absolument fascinante à voir tourner.
Je conçois et j’anime aussi des ateliers manuels et de médiation numérique autour de thèmes variés :les grands explorateurs, les jeux vidéo, les Vikings, les sciences, ou encore la médecine.
Chaque atelier se conclut par un petit projet personnel : les participants choisissent un objet en 3D à imprimer, à peindre et à emporter chez eux.
Mais au-delà de la fabrication, il y a un vrai enjeu humain.
Ces ateliers s’adressent souvent à des enfants exclus temporairement de leur collège.
Mon objectif est de leur offrir une autre vision des études et du monde qui les entoure.
Je veux leur montrer qu’on peut aimer apprendre autrement, qu’il existe d’autres voies pour réussir, et surtout qu’on peut vivre de sa passion.
Quand ils allument leur console, ou qu’ils voient une pièce sortir d’une imprimante 3D, je lis dans leurs yeux cette fierté qu’aucune note sur un carnet ne peut donner.
C’est pour ces moments-là que je fais ce métier.

Dans l’atelier, un léger vrombissement remplit l’air, un son presque hypnotique, régulier, qui accompagne chaque idée en train de naître. Les imprimantes 3D fonctionnent côte à côte, parfaitement alignées, leurs bras mécaniques dansant au rythme d’un langage que seuls les passionnés comprennent vraiment. Chacune trace patiemment des couches de matière, transformant des lignes de code en objets tangibles, des modèles virtuels en prototypes réels. C’est une scène presque chorégraphique : la buse se déplace, dépose, s’élève, puis revient, encore et encore, pendant que la chaleur du plateau et la lumière des écrans bleutés emplissent la pièce d’une atmosphère à la fois concentrée et rassurante. Ici, rien n’est figé. Tout évolue, se construit, se transforme. À Bondy, dans ce fablab installé au cœur de la ville, ces imprimantes sont bien plus que de simples machines : elles sont le prolongement des mains, des esprits et des rêves des jeunes et des adultes qui franchissent la porte de l’atelier.
Chaque impression raconte une histoire différente. Parfois, c’est une pièce de robot dessinée la veille par une jeune fille pleine d’imagination, qui découvre comment ses plans 3D deviennent un objet réel. D’autres fois, ce sont des boîtiers pour la console LUMA, les premières coques imprimées d’un prototype qui s’affine semaine après semaine. Entre deux sessions de découpe, les machines chauffent, le plastique se tend, la matière se solidifie, et les idées prennent forme. Les tables se couvrent peu à peu de petites pièces étranges, d’outils, de cartes électroniques, de prototypes en cours d’assemblage. Ce chaos apparent est en réalité un écosystème organisé, une ruche créative où chacun apprend à observer, à corriger, à recommencer.
Ce qui est fascinant, c’est de voir à quel point la fabrication numérique, ici, devient une passerelle entre les générations et les disciplines. Les jeunes apprennent à concevoir, à modéliser, à comprendre comment fonctionne une imprimante, pendant que les adultes s’initient à la mécanique, à la programmation, ou à la création d’objets utiles au quotidien. Le fablab est un lieu de rencontre où la technologie redevient humaine, où l’on prend le temps d’expliquer, de transmettre, de partager une idée. Et c’est précisément ce que j’aime dans mon rôle de fabmanager : être au milieu de cette effervescence, entre les imprimantes qui tournent, les enfants qui posent mille questions et les créateurs qui cherchent à perfectionner un détail.
À travers ces imprimantes, c’est toute une philosophie qui s’exprime. Celle du faire, du toucher, du comprendre. Dans un monde où tout semble instantané, ici, il faut attendre, observer, laisser la machine construire lentement. Il faut accepter les erreurs, les petites imperfections, les couches mal déposées. C’est un apprentissage de la patience et de la rigueur, mais aussi un immense terrain de liberté. Rien n’interdit d’essayer, de se tromper, de recommencer différemment. Chaque impression terminée devient une petite victoire : la matérialisation d’une idée née dans la tête d’un enfant, d’un étudiant, d’un artiste ou d’un simple curieux.
À Bondy, ces moments sont précieux, car ils prouvent qu’au cœur même d’un quartier souvent perçu à travers ses difficultés, la créativité, l’innovation et la passion sont bien vivantes. Ce n’est pas seulement un atelier de machines, c’est un lieu d’espoir et d’ouverture, un espace où l’on apprend à fabriquer, mais aussi à se découvrir soi-même. Les imprimantes 3D sont alignées, prêtes à relancer de nouveaux projets, et leur ronronnement collectif ressemble à une respiration. Celle d’un lieu qui vit au rythme des idées, et d’une équipe qui croit profondément en la puissance de la création.

Dans l’atelier, tout semble se rejoindre, les univers s’entrelacent comme s’ils avaient toujours été liés : la 3D, le jeu de rôle, l’électronique, la création sous toutes ses formes. Je ne m’arrête jamais vraiment, car chacune de ces disciplines nourrit les autres, et c’est justement dans cet entrelacement que naît la magie. J’organise régulièrement des animations autour du jeu de rôle, un moment où l’imagination prend le dessus, où les participants deviennent tour à tour explorateurs, inventeurs ou créatures fantastiques, et où le récit devient prétexte à la création. Les dés roulent, les histoires s’inventent, les mondes se bâtissent à voix haute avant de se matérialiser sous forme d’objets, de décors ou de prototypes modélisés en 3D. L’imaginaire nourrit la technique, la technique donne corps à l’imaginaire, et c’est dans cet aller-retour constant que les idées prennent vie. Ces sessions ne sont jamais anodines, car elles montrent que la créativité n’est pas une qualité réservée à quelques-uns : elle sommeille chez tous, il suffit de lui donner la place d’exister. C’est aussi pour cela que j’anime des cours d’initiation à l’électronique pour les adultes, souvent intimidés par les circuits, les capteurs, les mots techniques, mais qui découvrent très vite que tout cela n’est pas si compliqué, qu’il suffit d’observer, d’essayer, de comprendre les gestes. Et quand je les vois réussir à souder pour la première fois, à faire clignoter une LED, à voir leur petit montage fonctionner, il y a toujours un sourire discret, une fierté sincère, comme un enfant qui découvre que ses mains peuvent fabriquer de la lumière. C’est une joie contagieuse, parce qu’elle me rappelle que la curiosité n’a pas d’âge, qu’on peut apprendre et s’émerveiller à tout moment de sa vie, et que la technologie, loin d’être froide, devient humaine quand elle est partagée.
Au milieu de tout cela, il y a les jeunes, ces esprits en éveil qui transforment chaque idée en aventure. L’un des projets les plus marquants du moment est celui d’une jeune fille du fablab qui conçoit un robot entièrement en 3D. Chaque pièce est dessinée avec précision, imprimée avec patience, poncée jusqu’à obtenir un ajustement parfait. Je l’ai vue tracer ses premiers plans, comparer les volumes, corriger les angles, réfléchir à la manière dont les éléments allaient s’emboîter, puis passer des heures à assembler les parties, à ajuster les fixations, à faire en sorte que tout tienne ensemble. Ce travail minutieux, presque méditatif, est une preuve que la création, lorsqu’elle est vécue, devient un langage universel : elle apprend la rigueur, la persévérance, la concentration, mais aussi la fierté d’avoir bâti quelque chose de concret à partir de rien. Ce projet de robot, comme tant d’autres, symbolise tout ce que j’aime dans ce métier. Il montre qu’avec de la patience, de la curiosité et un accompagnement bienveillant, on peut donner à chacun les moyens de transformer une idée en réalité. Ce n’est pas seulement un exercice technique, c’est une métaphore de la vie dans un atelier comme celui de Bondy : un lieu où l’imagination trouve des outils pour s’exprimer, où les rêves deviennent des schémas, des circuits, des objets, et où, au bout du compte, on apprend à croire en ce que l’on crée.

🌱 Conclusion
Être fabmanager à Bondy, c’est bien plus qu’un simple emploi, c’est une aventure humaine et technique, une mission profondément ancrée dans la réalité sociale du lieu tout en étant tournée vers l’avenir. Chaque journée passée dans le fablab est une exploration, une expérience de partage et d’apprentissage mutuel. C’est un espace où se mêlent des parcours très différents, des rêves en construction, des jeunes pleins d’idées et des adultes qui redécouvrent le plaisir de fabriquer. Ce poste est devenu pour moi la continuité naturelle de tout ce que j’ai entrepris jusqu’ici, le prolongement logique d’un chemin fait de curiosité, de bricolage, de passion et d’une volonté constante de comprendre le monde par la création. J’ai toujours aimé toucher la matière, qu’elle soit bois, métal ou silicium, et voir comment un geste, une idée, un plan, pouvaient donner naissance à quelque chose de tangible. Aujourd’hui, je me rends compte que ce que j’ai appris dans les ateliers de menuiserie ou dans mes expériences personnelles autour de la console LUMA trouve ici tout son sens. Le fablab est devenu un lieu où mes compétences techniques rencontrent ma volonté de transmettre, où la technologie redevient un prétexte pour parler d’humain, d’imagination et d’avenir.
À Bondy, cette mission prend une dimension particulière. Ce n’est pas seulement un atelier de fabrication, c’est un refuge d’expression dans un territoire où l’on ne croit pas toujours que la création peut être une voie d’épanouissement. Ici, les outils numériques ne sont pas des gadgets, mais des leviers pour apprendre autrement, pour reprendre confiance, pour prouver que l’on est capable. Chaque projet mené, chaque console LUMA assemblée, chaque robot imprimé en 3D devient un symbole d’autonomie et de créativité. Les jeunes qui viennent ici ne se contentent pas de reproduire : ils inventent, ils explorent, ils s’approprient la technologie. Les adultes, eux, découvrent qu’il n’est jamais trop tard pour apprendre, pour comprendre comment un capteur réagit, comment un objet prend forme, comment on peut passer d’une idée floue à un prototype réel. Dans tout cela, il y a une immense satisfaction, celle de voir les regards s’allumer, de sentir la fierté monter au moment où un projet fonctionne enfin.
Entre la console LUMA, les ateliers que j’anime, les projets des jeunes, les expériences que nous testons, et toutes les idées nouvelles qui surgissent chaque semaine, j’ai le sentiment d’être exactement à ma place. Tout ce que j’ai construit jusque-là converge vers cette mission : transmettre, fabriquer, éveiller la curiosité et rappeler que la création est une liberté fondamentale. Être fabmanager, c’est jongler entre la technique et l’humain, entre la précision du geste et la spontanéité de l’idée. C’est être un guide sans jamais cesser d’apprendre soi-même, un artisan du numérique au service de la découverte et du partage. Dans cet atelier de Bondy, chaque jour a une couleur différente, une lumière particulière, et chaque projet, aussi petit soit-il, contribue à tisser une toile de sens, d’énergie et d’espoir. Et dans ce mélange de bruits d’imprimantes, d’odeurs de bois et de conversations passionnées, je sais que je fais exactement ce que j’étais censé faire : créer, accompagner, et donner envie aux autres de croire en leur propre potentiel.






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